Cauchemar pour Max!
Ce matin-là, Max accueillait une nouvelle étudiante dans son bureau. Il lui expliquait le règlement de l’institut en insistant particulièrement sur l’importance de la tenue vestimentaire. Mais soudain, en plein milieu de son explication, il fut dérangé par une série de coups frappés à la porte...
Max n’aime pas être dérangé pendant une leçon ; aussi choisit-il d’ignorer l’importun et de poursuivre comme si de rien n’était.
Malgré cela, il vit la porte s’entrouvrir lentement et la silhouette d’Annouk, sa secrétaire apparut sur le seuil. Elle était suivie de Marcel le gardien, de madame Charlotte, la présidente du conseil et de Monsieur Griselit, le surveillant général. C’est ce dernier qui prit la parole.
« Nous avons un petit souci, Max, monsieur Roncheux, le professeur de français…
- Oui, quoi, qu’est-ce qu’il a, Roncheux ?
- Oh ! C’est affreux, Monsieur Max ! je ne sais pas comment vous l’annoncer ! gémit la secrétaire.
- Il est mort ?"
Quelques secondes de silence...
" Pire que ça , Monsieur Max : il a craqué ! grommela Marcel
- Craqué ? Roncheux ? Un enseignant chevronné !
- Hélas ! répondit M. Griselit, dépression nerveuse, burn-out, on ne sait pas exactement… Il n’a pas supporté de prendre cette classe de 10ème année dès la rentrée ! Il a envoyé un certificat médical et une lettre de démission !
- Et en attendant, intervint Charlotte, il n’y a personne pour prendre la classe ce matin ! Et ça, ce n’est pas possible, tu le sais bien, Max !
- Et toi, Charlotte, tu pourrais peut-être …
- C’est hors de question, Max ! J’ai le conseil d’administration à préparer, des versions à corriger, et les 10ème années, non merci !
- Donc c’est Max qui s’y colle ? Merci, sympa ! C’est la pire de l’Institut, cette classe de 10ème année ! Un vrai cauchemar … D’accord, je m’en occupe, mais toi, tu finis d’expliquer le règlement à cette jeune Lady ! »
La mort dans l'âme, Max a laissé son bureau à Charlotte. Il entame maintenant sa lente progression vers le lieu de son supplice…
Il approche, pourtant. La salle 10 est au bout du couloir. Normalement, il devrait déjà entendre le chahut habituel d’accueil, mais rien… peut-être sont-elles toutes tombées malades ?
La porte est entrouverte; avant de la pousser, Max lève la tête : pas de seau d’eau posé en équilibre… il peut y aller. Il entre prudemment, vérifie qu’aucun fil n’est tendu au ras du sol pour le faire chuter…
D’un même mouvement, toutes les élèves se lèvent en silence en se tenant bien droites face à leur pupitre. Etonnant … Max pense qu’il a dû se tromper de salle, il scrute les visages des étudiantes…
Non non, c’est bien ça ; il les reconnaît. Il y a là entre autres Angéla et Margot, ainsi que Dorothée et Justine…Il reconnaît aussi Elsa et Prune, sans oublier les terribles Fanny et Léa !
« Bonjour monsieur Max! » lancent-elles en chœur .
Aucune grimace, aucun pied de nez, aucune langue tirée, .. bizarre !
Il leur fait signe de s’asseoir et s’apprête à faire de même, mais au dernier moment, il se ravise et inspecte son siège. C’est curieux : pas la moindre punaise, pas de trace de glu, pas de coussin péteur …
Tout ça lui semble louche. Il préfère rester debout et se retourne pour écrire la date. Le tableau est propre, vide, ni tags ni graffitis obscènes…. Il se crispe dans l’attente des projectiles qui ne devraient pas manquer de l’atteindre… mais rien ne se passe comme prévu : la date est écrite sans qu’il ait été interrompu. Il se retourne face à la classe, s’attendant au pire, et ce qu’il voit le laisse sans voix !
Toutes les étudiantes, sans exception, ont ouvert leur cahier, et sont en train de recopier la date avec soin. Elles soulignent proprement à la règle, posent leurs mains à plat sur la table et attendent sagement en silence.
Interloqué, Max annonce une dictée. Au fur et à mesure qu’il dicte, elles écrivent sans l’interpeller à la cantonade . Max passe dans les rangs… à distance raisonnable au cas où une effrontée s’aviserait de vouloir lui tirer les poils du bouc. Pas d’antisèche en vue… pas de regard en biais sur le cahier de la voisine, pas de bavardage…
Mais que se passe-t-il donc ?
Tout ça n’est pas normal : elles sont sans doute en train de mijoter quelque chose… quelque chose d’abominable qui dépasserait en abjection tout ce qu’il peut imaginer. Il sent une sueur froide couler dans sa nuque. Sa gorge est sèche. Il annonce d’une voix blanche qu’il ramasse les copies…
Il y en a bien une qui va se mettre debout sur une table et chanter à tue-tête… ou faire la danse du ventre ? Hein ?
Eh bien non ! Elles restent assises et silencieuses, dans l’attente de la consigne suivante.
Mais elle ne vient pas… elle ne viendra plus.
Il n’arrive plus à articuler le moindre son… Il est devenu muet … Ah ! C’est immonde ! Elles ont poussé l’ignominie jusqu’à parvenir à le faire taire ! Définitivement !
Et le pire, c’est qu’il ne pourra même pas les punir : il n’a aucun motif !
Et soudain, la sonnerie de fin de cours retentit, stridente, insistante, violente, interminable…
Alors, Max se retourne dans son lit et appuie rageusement sur son réveil pour le faire taire !
Merci au talentueux MacMiche pour son superbe dessin !
Et comme il a récidivé, je ne résiste pas au plaisir de publier la suite : Charlotte prend la suite avec la nouvelle élève: