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Institut du Professeur Max
14 décembre 2016

Kidnapping en Laponie

C’était par une froide soirée de décembre au fin fond de la Laponie. Je passais avec mon ami Fesslock Holmes quelques jours de méditation dans un tipi atypique.

Ce n’est pas que je m’ennuyais, mais la Laponie, en hiver, c’est uniformément blanc, et à la longue, ça en devient monotone.

« Holmes, lui dis-je, il nous faudrait un bon mystère à résoudre ! »

Mais mon ami, perdu dans ses pensées, ne me répondit pas. Je renchéris :

«  Nous ne sommes pas faits pour rester tapis dans ce petit tipi atypique ! Il nous faut pourchasser les escrocs, les malfrats, les faussaires…

- Et les menteurs, mon cher Maxon ! me répondit-il. Mais ne vous inquiétez-pas, nous allons avoir de la visite.

- Et qu’est-ce qui vous fait croire ça ?

- N’avez-vous pas entendu ce petit frémissement dehors ? C’est le bruit caractéristique d’un traîneau qui freine !

- Rien n’indique qu’il s’arrête chez nous !

- Notre voisin le plus proche est à 20 miles, mon cher Maxon ! »

J’allais rétorquer quand le bruit de la clochette de la porte d’entrée se fit entendre.

J’introduisis le visiteur qui n’était autre que l’inspecteur Maïk de la police lapone.

Il était dans tous ses états, tremblant, bafouillant, tripotant nerveusement un magazine qui dépassait de sa poche. Je dus lui servir trois vodkas avant qu’il puisse articuler quelques mots.

«  C’est épouvantable, gémit-il, le Père Noël a disparu !

- Ce n’est pas possible, m’écriai-je !

- C’est affreux. Il est sorti dehors hier soir, pour atteler son traîneau, vérifier la pression des rennes… Et depuis, plus personne ne l’a revu !

- Il a peut-être pris un petit coup de froid, suggérai-je, il sera resté au chaud en attendant ce soir.

- C’est une des hypothèses que nous avions envisagées. Je veux bien une autre vodka. Nous avions pensé aussi à un accident domestique… »

Il s’interrompit scrutant le visage de Fesslock Holmes : celui-ci semblait se désintéresser totalement de la situation. Maïk poursuivit :

 « Mais il y a une heure, nous avons reçu cette lettre anonyme ! »

Il tendit à Holmes une feuille de papier sur laquelle était inscrite cette phrase lapidaire :

Lettre anonyme

Tel un ressort, mon ami se leva de son fauteuil.

« Il n’y a pas une minute à perdre ! s’écria-t-il, Allons-y. »

Quelques secondes plus tard nous étions habillés et installés dans le traîneau de Maïk.

 

L’usine du père Noël est un gigantesque entrepôt situé en périphérie dans lequel s’activent plusieurs centaines de lutins (quatre cent quatre vingt sept pour être précis) . Ces lutins sont d’ailleurs en grande partie des lutines . Devant l’entrée de l’entrepôt, un énorme traîneau auquel étaient attelés plusieurs dizaines de rennes, attendait d’être chargé.

« Nous n’avons touché à rien, dit Maïk, vous pouvez essayer de récolter quelques indices.

- Il doit y avoir des trace de pas dans la neige, dis-je d’un ton docte. Nous savons reconnaître les empreintes de tous les animaux : les ours, les élans, les kangourous, …

- Et les panthères, mon cher Watson ! » m’interrompit Holmes

traineau_pere_noel

 

Vexé , je restai à l’écart pendant que mon ami examinait de larges empreintes dans la neige autour du traîneau. Mais, la curiosité aidant, je finis par m’approcher… les empreintes était énormes : des sphères en creux d’au moins vingt centimètres de diamètre et toujours par deux !

« Oh my god ! m’écriai-je . Ce ne sont pas des petits pas lapons ! Quel est l’animal monstrueux capable de laisser des empreintes de pas de cette taille ? Au moins un yéti !

- C’est presque ça,  Watson. A une petite nuance près : il ne s’agit pas d’un animal, encore moins d’un yéti, et ce ne sont pas des empreintes de pas !

- C’est quoi, alors, demanda Maïk.

- Ce sont des empreintes … de fesses.

- De fesses ? Mais pourquoi ?

- C’est ce que nous allons chercher à savoir. Entrons. »

Nous fûmes accueillis par une lutine que nous décidâmes d’interroger en premier.

« Nom, prénom, âge et qualité ? demandai-je

- Loutchi pour le nom, May pour le prénom. Je ne dirai pas mon âge car je suis la doyenne des lutins.

- Qualité ? insistai-je

- Je les ai toutes, répondit l’effrontée lutine.

- Parlez-nous du père Noël , intervint Holmes, aviez-vous remarqué quelque chose de particulier dans son attitude, ces derniers temps ?

- Au contraire, répondit May Loutchi, il était en pleine forme ! Il donnait même l’impression d’avoir rajeuni : plein d’entrain,  alors que les années précédentes, on avait l’impression qu’il avait pris un coup de vieux !

- Où étiez-vous au moment des faits ?

- Dans l’entrepôt avec les autres lutins, en train d’emballer les cadeaux.

- Vous n’avez vu personne sortir à part le père Noël ?

- Vous savez : ça va , ça vient… je ne peux pas vous dire.

- Bien, je veux voir tous les lutins alignés dehors face au mur. »

La doyenne donna les instructions nécessaires, et les quatre cent quatre vingt sept lutins s’alignèrent face au mur en maugréant.

Lorsqu’il obtint un peu de silence, Holmes s’adressa à tous :

« Cul nu ! »

Des cris de protestations se firent entendre ça et là comme quoi ça ne se faisait pas que d’abord il fait trop froid, mais les lutins finirent tous par obtempérer et dévoilèrent quatre cent quatre vingt sept paires de fesses, ce qui faisait un total de neuf cent soixante quatorze fesses.

Maïk, Fesslock Holmes et moi examinèrent attentivement toutes ces fesses afin de les comparer aux empreintes laissées dans la neige.

Deux heures plus tard, nous avions retenu trois paires de fesses suspectes , celles de Miss Rabelle, de Hay Lee et de Li Ho.

Très mécontentes, les trois lutines avaient décidé de rester mutiques.

A la demande de Holmes, et dans le but de les mettre en confiance, je les couchai chacune leur tour en travers de mes genoux et claquai vigoureusement les trois paires suspectes... Et la confiance finit par s'installer.

« Oui, nous nous sommes assises dans la neige, gémit Miss Rabelle, mais c’était ce matin…

- Bien après la disparition du père Noël. compléta Li-Ho.

- C’était juste pour refroidir nos pauvres fesses ! termina Hay-Lee.

- Mais pourquoi vos fesses avaient-elles besoin de refroidir ? demanda Holmes

- C’est à cause de Fouettard…

- Fouettard ?

- Le remplaçant qu’on nous a envoyé. Il s’est installé ce matin dans le bureau du père Noël.

- Il est très sévère !

- Il a un gros martinet !

- Mais pourquoi ne me l’avez-vous pas dit plus tôt ? rugit Holmes. Disparaissez ! Vilaines Lutines ! »

Les trois fautives s’enfuirent en courant et disparurent dans l’entrepôt.

A notre tour, nous pénétrâmes à l’intérieur. Le bureau se trouvait à l’autre bout. Nous avancions prudemment en essayant de ne pas nous faire remarquer. Juste avant le bureau, Holmes me désigna une petite porte entrouverte .

« Mon cher Maxon, allez donc jeter un œil dans ce réduit. »

Désireux de bien faire, je fis ce qu’il me demandait. Il y avait des boîtes de foie gras, du saumon fumé, des bouteilles de champagne, ainsi qu’un vieux manteau rouge et une fausse barbe blanche… bref, rien d’intéressant.

« RAS, Holmes lui dis-je. Rien que des produits… euh comment dire ?

- Alimentaires, mon cher Maxon ?

- Voilà… Et aussi un vieux manteau rouge et une fausse barbe blanche… aucun rapport avec notre enquête ! »

Je ne sais pas pour quelle raison il me jeta un regard noir… Il entra à son tour dans le réduit et en ressortit avec le manteau et le postiche. Pendant ce temps, Maïk remettait dans sa poche le magazine qui était tombé de son manteau.

Du bureau, nous parvenaient des sons divers : claquements, gémissements. Holmes poussa la porte. Un homme en manteau gris, armé d’un martinet, était en train de fouetter les fesses de deux lutines.

lutinefess_es

 

« Je suis à vous, tout de suite, Messieurs. Permettez que je termine.

- Je vous en prie, répondit Holmes. Prenez votre temps. »

Les claquements et les gémissements reprirent de plus belle.

Au bout de cinq minutes,  il congédia les deux lutines, à leur grand soulagement.

Lorsqu’il se retourna vers nous, il aperçut le manteau et la barbe et pâlit aussitôt.

Holmes prit la parole :

« Où est le père Noël, Monsieur Fouettard ?

- Il est mort, hélas....

- Oh my god ! m’écriai-je. Vous l’avez tué!

- Oh non ! Mon bon monsieur, je ne l’ai pas tué… Il est mort de vieillesse, il y a plus d’un an !

- Vous mentez ! hurlai-je.  Il n’a disparu que depuis hier ! »

Holmes agita les objets qu’il tenait à la main :

« Il est temps de vous expliquer, Monsieur Fouettard !

- Je vais tout vous dire. Le père Noël était un vieil ami : nous avons longtemps travaillé ensemble. Lui s’occupait des récompenses et moi des punitions. Mais à la fin, il n’avait plus toute sa tête : il récompensait les pires chipies et m’envoyait punir de pauvres innocents. Et puis l’an dernier, il s’est éteint le 24 décembre avant de pouvoir effectuer sa tournée. »

Je vis Maïk essuyer furtivement une larme et sentis mes yeux se mouiller. Seul Holmes restait impassible. Fouettard continua :

« Alors, j’ai endossé son costume et sa barbe, et j’ai pris sa place : il fallait bien que quelqu’un le fasse ! Et depuis un an, je me fais passer pour lui, parlant gentiment à tout le monde, caressant les cheveux… J’ai pris sur moi : plus de fessée, plus de coups de martinet… pendant un an ! Mais là, hier, j’ai craqué : la saturation, le burn-out ! J’ai arraché ma barbe, jeté le manteau et retrouvé mon rôle de fouetteur !

- Et la lettre anonyme ?

- Quelle lettre anonyme ? »

Holmes lui tendit le document.

« Mais ce n’est pas moi ! Je n’ai jamais demandé la destruction des cadeaux ! »

Il avait l’air sincère. Je me tournai vers mes compagnons. Holmes regardait d’un air insistant Maïk qui prenait un air détaché en essayant de siffloter.

« Maïk ? Pouvez-vous me prêter votre magazine s’il vous plaït ? demanda mon ami.

- Je … euh… je peux tout expliquer… »  balbutia le policier lapon en tendant à Holmes un magazine dans lequel des lettres avaient été soigneusement découpées.

« Oui, j’avoue : la lettre est de moi. Mais j’étais sûr que sans ça, vous n’auriez pas levé le petit doigt. J’ai un peu forcé la dose, c’est vrai, mais vous avez résolu l’affaire !

- C’est une faute professionnelle, Maïk ! Je vais devoir en référer à vos supérieurs ! »

Choqué par l'attitude impitoyable de mon ami, je m’apprêtais à intercéder en faveur du pauvre policier.

Maïk répondit d’un ton plaintif :

« S’il vous plaît, Holmes ne faites pas ça : ils vont m’enchaîner nu dans une cave et me fouetter !

- Il faut que justice se passe , Maïk !

- Et puis, je vais perdre mon emploi ! »

Holmes réfléchit quelques secondes… tous les regards étaient braqués sur lui.

« J’ai peut-être une solution qui résoudrait tous les problèmes : vous démissionnez de la police . J’ai un autre emploi pour vous . »

Et il tendit à Maïk le manteau rouge et la fausse barbe blanche.

« Fouettard redevient Fouettard, vous devenez père Noël.

- Oh merci Holmes s’écria le policier en l’embrassant. J’ai toujours rêvé d’être père Noël !

- Allez dépêchez-vous ! répondit mon ami en s’essuyant les joues. Votre hotte est prête et vos rennes vous attendent ! »

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Commentaires
P
Bonjour à tous et toutes....<br /> <br /> <br /> <br /> Oser fesser notre dévoué Professeur ??? Diable, quelle effronterie !!! Faut oser !!<br /> <br /> Hum... Pour les étrennes, on pourrait lui offrir un nouveau martinet... en scoubidous ?<br /> <br /> Je passerais parmi vous muni d'un chapeau pour récolter la dérisoire somme de 6 Euros 50 c. - Tant que ça ????<br /> <br /> ( Z'avez vu ? il arrête pas de fayoter, Peter !! - c'est vrai !! - on va lui faire sa fête à la récré !! - Ouais ! Bonne idée ! - Planquez-vous, il arrive !...)<br /> <br /> Peter'
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C
excellent conte mon cher Max mais je trouve que ce cher Maïk méritait avant une bonne fessée de la part du père Fouettard!! il la méritait pour avoir osé faire ce genre de messages et je ne parle pas de ce cher Maxon qui en mérite une aussi pour ne pas savoir reconnaître des empreintes de fesses!! une bonne fessée et ensuite un petit passage les fesses bien chaudes dans la neige pour apprendre à faire des empreintes de neige!! et come je suis très serviable, tu connais mon sens du dévouement, je peux te rougir les fesses!!
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S
Parmi les quatre cent quatre vingt sept paires de fesses lesquelles sont les plus belles ?
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A
Merci, Docteur Maxon, pour ce très beau conte de Noël ! Je l'ai adoré ! :-)
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P
Bonsoir Professeur Holmes, <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> What a lovely tale !!!! Excellente, la chute !! Très astucieuse, l'intrigue. Notre Mike en policier lapon, c'est bien trouvé ! Pour cette fois, l'inspecteur Peter joue les spectateurs. Et puis les lutines... lutinent... Rires. Illustrations très à propos. <br /> <br /> C'est revigorant par le temps qu'il fait. Et le père Nono , qui s'emmêle la hotte...<br /> <br /> Cet été, ma petite "enquête" à l'institut vous avez donné l'idée d'une intrigue , du style Sherlock et le "fesseur fou". Enfin dans cet esprit-là. Bien, bien tout çà.<br /> <br /> Peter Pan
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